Lancée en septembre 2016, l’appli mobile TikTok n’en finit pas de cliver le monde politique de plusieurs continents. Prisé de la jeunesse, revendiquant un milliard d’utilisateurs, ce mastodonte des réseaux sociaux plaît à nombre d’Africains, notamment les aficionados sénégalais d’Ousmane Sonko, qui y voient un canal de mobilisation d’une tranche d’âge plutôt spécifique.
À l’inverse, les autorités du pays de la Teranga, notamment le ministre de la Communication, des Télécommunications et de l’Economie numérique, reprochent à l’application chinoise la diffusion de messages « haineux et subversifs ». C’est en août dernier, après l’arrestation du leader du Pastef et la dissolution de son parti, que l’accès à TikTok a été bloqué…
Après des pourparlers avec une délégation de l’entreprise chinoise ByteDance, l’exécutif sénégalais a confirmé, le 5 octobre dernier, l’interdiction de l’application. Il réclamait une meilleure réglementation de la plateforme, davantage d’explications sur le mode de fonctionnement de l’algorithme de flux et la protection des données personnelles, ainsi qu’un mécanisme de suppression des comptes. Si les spécialistes mondiaux de l’addiction se montre réservés sur l’usage de TikTok, les politiciens lui font, eux, des griefs spécifiques.
Certains des leaders européens ont cédé au jeunisme que l’appli promet, mais d’autres craignent que celle-ci soit un outil d’espionnage par le régime de Pékin. En Afrique, la Somalie a banni TikTok pour éviter la propagation de messages des terroristes d’Al-Shabab tandis qu’au Kenya la suspension pour diffusion de fake news a été temporaire, le directeur général du réseau social ayant annoncé, après la période des élections, l’ouverture d’un bureau à Nairobi. Un bureau équivalent au Sénégal calmerait peut-être les esprits à Dakar. Les discussions devraient continuer…
Lors de ses derniers scrutins présidentiels, le Sénégal a démontré l’importance des réseaux sociaux pour la transparence d’un processus électoral national jugé plutôt exemplaire. À moins de cinq mois de la prochaine élection, il convient que la réflexion sur la politisation du dernier venu de poids, TikTok, puisse aboutir à une conclusion définitive qui ne ressemble ni à un laxisme qui laisserait proliférer la violence verbale ni à un musellement subjectif, fréquemment contre-productif et souvent contourné. La solution passera notamment par l’éducation aux médias, notamment ceux qui pullulent sur Internet.