Sonko : La vache laitière de l’opposition
La course vers la présidentielle de 2024 est lancée. Certains opposants ont déjà déclaré leur candidature et sillonnent le pays. D’autres sont au stade de vente de carte et de remobilisation des troupes. Le sortant Macky Sall démarre une série de tournées politiques tout en évitant de déclarer sa candidature. Si rien n’est clair pour les leaders sur le plan juridico-judiciaire, le volet politique garde aussi ses mystères.
Jusqu’ici, le président Macky Sall ne sait pas sur qui il pourra compter si jamais il devient candidat. Mais celui qui doit être le plus dans l’incertitude, c’est sans doute le leader du Pastef, Ousmane Sonko. Ce dernier marche en effet sur une voie pleine d’épines politiques. Il lui est difficile aujourd’hui de reconnaître les ‘’vrais’’ opposants avec qui il pourra travailler. Et le risque est grand pour lui d’être un vache laitière d’une opposition en manque de popularité, de devenir un faiseur de roi qui sera ensuite décapité par le roi.
Aux élections locales de janvier 2022, certains candidats sont devenus maires grâce à la coalition Yewwi Askan Wi. Barthélémy Dias a beaucoup bénéficié du poids de Sonko à Dakar pour devenir maire de la capitale, puis député. D’autres ont été élus, sans être réellement connus. Certains ont ensuite rejoint le pouvoir.
Aux législatives de la même année, Yewwi s’est ligué avec Wallu. Les deux coalitions ont eu un nombre de députés égal à celui de la majorité présidentielle, une première dans l’histoire politique du Sénégal. Face à l’absence de leader au Pds et au manque d’énergie de Khalifa Sall, c’est Ousmane Sonko qui est monté en première ligne. Il a battu campagne de bout en bout, permettant au parti de Wade d’avoir plus de 20 députés.
Une fois à l’Assemblée nationale, le Pds a tourné le dos à Yewwi et Sonko. Wallu a gardé une neutralité sur toutes les initiatives de Yewwi, ce qui est à l’avantage du pouvoir. Ensuite le Pds a aidé Benno bokk yaakaar à éjecter Mimi de l’Assemblée nationale. Une posture que le contentieux entre l’ancien ministre de la justice et le Pds ne suffit pas à expliquer sur le plan politique.
Aujourd’hui que la course est lancée pour la présidentielle de 2024, Sonko risque de revivre le même scénario. C’est lui qui multiplie les sorties contre Macky Sall, lui et ses partisans mènent le combat dans la rue et sur les réseaux sociaux. Pendant ce temps, ces alliés de Yewwi sont presque introuvables. De quoi les soupçonner de vouloir tirer les ficelles en silence.
Certains soutiennent déjà que Khalifa Sall négocie avec le pouvoir, ce qui expliquerait son manque de verve vis-à-vis du régime de Macky Sall. D’autres disent avoir noté un manque d’engagement de Barthélémy Dias aux côtés de Sonko ces derniers mois où il fait face à la Justice. Pendant ce temps, Babacar Diop, devenu maire de Thiès, a pris ses distances avec Yewwi et semble se rapprocher du pouvoir. Déthié Fall s’est donné une nouvelle image et plus de notoriété en coordonnant les activités de Yewwi avant de déclarer sa candidature à la présidentielle de 2024.
Le leader du Pastef court donc le risque de se multiplier sur les fronts pour faire face à Macky Sall ; et à l’arrivée, par manque de ruse ou d’expérience politique voir les autres leaders récolter les fruits de son travail et lui tourner le dos, comme le Pds l’a déjà fait. Après tout, Idrissa Seck a rejoint le pouvoir au lendemain de la présidentielle de 2019. Et des leaders du Pds comme Oumar Sarr, engagés dans le ‘’dialogue national’’, ont fini par entrer dans le gouvernement. Tous se disaient opposants. Mais les masques ont fini par tomber.