Les enfants atteints du syndrome de « Prune Belly” s’exposent à des complications comme l’altération du fonctionnement des testicules pouvant entraîner le cancer. Beaucoup d’entre eux n’auront pas de descendance. Leur souffrance est aussi endurée par leurs parents soutenus par les rares spécialistes de cette maladie. Une association peine à faire entendre sa voix en dépit de l’augmentation des cas. Le syndrome de « Prune Belly » ne mobilise pas encore le Ministère de la Santé du Sénégal, ni les partenaires techniques et financiers.
Le syndrome de ‘’Prune Belly’’ ne fait pas les choux gras de la presse. Les autorités n’en parlent pas. Pourtant, cette pathologie est une charge financière et psychologique pour les parents des enfants malades. Mais tout d’abord, qu’est-ce que c’est le syndrome de ‘’ Prune Belly’’ ? C’est une pathologie qui se caractérise par des malformations chez les enfants. « L’enfant naît avec beaucoup de malformations. Le ventre ressemble à celui d’un batracien », explique le professeur Gabriel Ngom, Chef chirurgie pédiatrie à l’Hôpital pour enfants, Albert Royer.
Ces signes les plus atypiques sont l’absence de muscle au niveau de l’abdomen, une absence totale de muscle, une méga-vessie. Par conséquent, les urines ne s’écoulent pas correctement.
L’autre anomalie, les testicules se localisent dans le vendre au lieu de se retrouver dans les bourses. L’enfant est souvent atteint d’infections urinaires répétitives.
Si les sujets ne sont pas pris en charge à temps, dès la naissance, ils peuvent décéder avant l’âge de cinq ans. Ces infections peuvent toucher les organes intérieurs, les membres inférieurs et supérieurs.
Un porte-étendard
La dame Khéwé Mbaye ne s’est pas laissée gagner le découragement, l’abattement. Elle a tenu bon. Elle a géré avec philosophie, le cas de son fils. Sa force de caractère fait d’elle, par la force des choses, un porte-étendard sur le front de la conscientisation des parents qui ont aussi des enfants souffrant de ces malformations. Les agents de santé orientent les parents vers Khéwé Mbaye.
« L’hôpital me contacte pour me dire qu’il y a un nouveau. Je me déplaçais pour réconforter la maman pour qu’elle ne souffre pas de la même manière que moi » dit-elle.
Avec l’augmentation du nombre d’enfants malades, d’autres parents et des sympathisants sont venus renforcer la Présidente de l’association qui compte actuellement 100 membres.
« Sur la page Facebook, il y a plus de 800 membres et une soixantaine de membres concrets et 30 enfants qui sont malades. Ces malades sont originaires de plusieurs localités. On en avait trois qui nous viennent de Ziguinchor, deux de Touba, plusieurs sont répertoriés à Thiès, à Dakar, à Kaolack. Nous avons eu récemment des cas à Bambey, Fatick entre autres… », énumère-t-elle.
Une maladie d’homme
Les bébés de sexe masculin sont les plus touchés. Au Sénégal, presque tous les enfants atteints sont des garçons. Dans tout le pays, on a identifié une seule fille âgée aujourd’hui 10 ans. Elle habite à Bambey. Les malades qui font partie de l’association sont des garçons. Ces chiffres confirment, dans une certaine mesure, que les filles sont moins exposées.
Tout compte fait, la prise en charge doit être précoce pour sauver le sujet ou prévenir l’altération des testicules dans le ventre. L’acte médical revient à faire une chirurgie.
La première opération consiste à la recherche et au rabaissement testiculaire. Cette opération doit être faite avant 18 mois. « Si cela ne se fait pas avant un an et demi, les sujets n’auront pas la chance d’avoir des enfants. D’ailleurs, les spécialistes affirment que si l’intervention chirurgicale n’est pas effectuée à temps, les testicules peuvent être névrosées dans le ventre ou provoquer un cancer. La deuxième intervention consiste à faire une réduction de la vessie ».
Au moins 05 décès
L’association a perdu trois malades pendant la Covid. Auparavant, elle en avait perdu 02. « Ces enfants n’avaient pas accès à leur traitement du fait du taux faible de fréquentation des hôpitaux pendant la pandémie. Les deux ont fait une infection urinaire et l’autre a eu une insuffisance rénale. Aujourd’hui il ne nous reste que 27 enfants qu’on est en train de traiter du mieux possible pour qu’ils puissent vivre avec la maladie », informe Madame Mbaye. Selon cette dernière, la maladie est certes mortelle mais, si l’enfant est bien pris en charge et ses interventions chirurgicales respectées, il peut bien vivre longtemps. A titre illustratif, un enfant âgé de dix ans qui a un rein vit bien et part à l’école.
Peu de chance d’avoir une descendance
En dehors du Sénégal, il y a un vaste réseau de ‘’Prune Belly’’. Parmi eux, il y a des personnes âgées de plus 70 ans. Il y a également un homme de trente ans qui est maintenant établi en France selon certaines confidences. « Cela veut dire que si on y met notre énergie, l’enfant peut vivre longtemps. C’est d’ailleurs pendant nos sensibilisations que sa sœur m’a appelé pour me dire que son frère souffre de la maladie. Certains lorsqu’ils se marient parviennent à avoir des descendants. Mais les médecins disent que sur 10 enfants, les 09 ne vont pas enfanter. Autrement, seul un malade sur dix aura la chance d’avoir une descendance. Mon fils a 19 ans, il a le bac et il est en train de suivre des études en droit public », se réjouit-elle.
Le ministère de la Santé aphone
« Je demande aux mamans de prendre en charge leurs enfants, de ne pas se décourager pour leur traitement. C’est possible. Mais il faut comprendre que la prise en charge d’un enfant normal et celui atteint du Syndrome de »Prune Belly » ne peut pas être la même », a précisé Madame Mbaye. Elle a évoqué le fait que certaines croyances au sein de notre société sont un obstacle à la prise en charge médicale précoce.
« Quand on met au monde un enfant atteint du syndrome de »Prune Belly’’ on vous dit que c’est un djinn ou il est atteint par un esprit maléfique et on te donne des conseils pour aller l’abandonner dans la forêt pour qu’il puisse rejoindre sa famille de démons », a-t-elle regretté. La dame se bat aussi contre ces idées reçues. Une accentuation de la sensibilisation s’impose.