Le mercato politique est fort animé, surtout à l’approche des Législatives du 31 juillet. Les acteurs ayant tourné casaque se retrouvent aussi bien dans les rangs du pouvoir que dans le camp de l’opposition. Mais le flux de transhumants vers les prairies présidentielles est plus dense.
Amina Nguirane a quitté le PDS pour soutenir Benno Bokk Yakaar (BBK) et le ministre de l’Intérieur, Antoine Diome. Idrissa Goudiaby a lâché la majorité pour rejoindre Ousmane Sonko de Yewwi Askan Wi. Le président du Conseil départemental de Mbacké, Serigne Fallou Mbacké, a pris le chemin inverse.
Les cas les plus emblématiques de transhumance en cette période électorale sont Cheikh Mbacké Bara Dolly et Mayoro Faye. Ces deux anciens responsables du PDS étaient, respectivement, président du groupe parlementaire Liberté et Démocratie à l’Assemblée nationale et secrétaire national chargé de la communication. Ils ont annoncé leur soutien à BBK pour les Législatives du 31 juillet.
Article 60
Les deux hommes sont investis sur la liste nationale de Wallu Sénégal. Cheikh Mbacké Bara Dolly occupe la 13e place tandis que Mayoro Faye est 19e. Cette position dans le ventre mou de la liste a d’ailleurs suscité leur courroux et provoqué la suspension de leurs activités au PDS.
S’ils sont élus grâce à la coalition qu’ils ont délaissée (Wallu), devront-ils démissionner ou garder leurs sièges de député ? En matière de transhumance, l’article 60 de la Constitution est clair : «Tout député qui démissionne de son parti en cours de législature est automatiquement déchu de son mandat. Il est remplacé dans les conditions déterminées par la loi organique.»
Si l’on se fie à cette disposition de la loi, Cheikh Mbacké Bara Dolly et Mayoro Faye n’ont pas de crainte à avoir. En cas d’élection, ils siègeront à l’Assemblée nationale sans courir le risque d’être déchus. Ils ont tourné casaque avant l’élection, alors que la loi parle de «démission en cours de législature». Et même s’ils démissionnaient du PDS après avoir été élus pour la prochaine législature, ils resteraient députés.
«L’esprit de la loi est faussé»
C’est que Cheikh Mbacké Bara Dolly et Mayoro Faye sont «couverts» par une faille du système. «La loi parle de parti politique et non de coalition, signale dans L’Observateur de ce jeudi Alioune Souaré, député et spécialiste du droit parlementaire. Il y a un vide juridique que les hommes politiques exploitent souvent. C’est le cas des députés Déthié Fall et Abdou Bara Dolly Mbacké qui avaient démissionné, respectivement, de Rewmi et Bokk Gis Gis, sans perdre leur mandat parce qu’ils étaient élus sur la bannière d’une coalition.»
Cette limite de la loi est à «corriger», de l’avis de Babacar Fall du Groupe de recherches et d’appui à la démocratie participative et la bonne gouvernance (Gradec). Un constitutionnaliste qui s’est confié sous anonymat à L’Observateur est du même avis.
Il dit : «Les députés de la prochaine législature sont interpellés parce qu’aujourd’hui on a huit coalitions. Et parmi ces coalitions-là, tout député qui démissionnerait en cours de législature de son parti politique ne perdrait pas son mandat. Donc en réalité, l’esprit de la loi est faussé.»